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Arbitrage international et effet négatif du principe de compétence-compétence : priorité de l’arbitre saisi en premier lieu sur la juridiction saisie

Civil - Procédure civile et voies d'exécution
Affaires - International
23/03/2021
Un tribunal arbitral, saisi en premier lieu, est compétent par priorité sur une juridiction de l’État saisie postérieurement pour apprécier si un différend entre dans le champ d'application d’une convention d'arbitrage, et ce en application de l’article 1448 du Code de procédure civile. Se fondant sur ce texte, un arrêt de la Cour de cassation du 17 mars 2021, qui applique ainsi l’effet négatif du principe de compétence-compétence, censure une cour d’appel qui s’est déclarée compétente mais aurait dû vérifier sa compétence en recueillant au préalable les observations des parties s’agissant de la saisine du tribunal arbitral.
Monsieur X a assigné Monsieur A, Madame B et Monsieur Z pour voir juger que la succession de Y est soumise à la compétence des juridictions françaises ; devant la cour d’appel, les défendeurs exposent que le tribunal arbitral rabbinique et les juridictions israéliennes, saisis en premier lieu, sont seuls compétents. La cour d’appel rejette l’argument en retenant, :
  • d'une part, que le tribunal de grande instance de Nanterre, dans le ressort duquel sont domiciliés deux des défendeurs, est compétent en application de l'article 42 du code de procédure civile ;
  • d'autre part, que Monsieur Z n'est pas partie aux procédures diligentées en Israël, tandis que les sociétés ne sont pas parties à la présente instance, et que l'objet du litige, en France et en Israël, n'est pas le même puisque Monsieur X demande la condamnation des défendeurs.
 
Effet négatif du principe de compétence-compétence
 
Les motifs de la cour d’appel sont inopérants pour la Cour de cassation. Celle-ci se fonde sur l'article 1448 du Code de procédure civile, applicable à l'arbitrage international en vertu de l'article 1506 du même code, qui dispose que « Lorsqu'un litige relevant d'une convention d'arbitrage est porté devant une juridiction de l'État, celle-ci se déclare incompétente sauf si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi et si la convention d'arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable » (al. 1). Pour la Haute cour, il résulte de ce texte – qui prévoit l’effet négatif du principe compétence-compétence (voir ci-dessous) – que le tribunal arbitral, saisi en premier lieu, est compétent par priorité pour apprécier si un différend entre dans le champ d'application de la convention d'arbitrage. Par conséquent, lorsqu’une juridiction de l’État est saisie et qu’une saisine antérieure d’un tribunal arbitral est alléguée, la juridiction de l’État doit « vérifier sa compétence au regard des seules dispositions de l'article 1448 du Code de procédure civile, en recueillant au préalable les observations des parties sur ce point » ; en ne le faisant pas, la cour d'appel a violé ce texte.
 
Remarques
L’effet négatif du principe de compétence-compétence vise les juridictions étatiques : il leur interdit de connaître les litiges couverts par la convention d'arbitrage et les contestations relatives à la compétence du tribunal arbitral, tant que les arbitres eux-mêmes n'ont pas eu l'occasion de se prononcer sur ce sujet.
 
Plus d’information sur ce sujet dans le Code de procédure civile commenté (Livre IV L'arbitrage Titre I L'arbitrage interne Chapitre I : La convention d'arbitrage Art. 1448) et dans Le Lamy contrats internationaux, n° 272-2. La décision ici présentée est intégrée à ce dernier numéro via une note de l’éditeur dans la version en ligne de l’ouvrage sur Lamyline dans les 48 heures au maximum à compter de la publication de la présente actualité.
  
Source : Actualités du droit